Ce que l’on entend par « alerte » au sens de la loi Sapin II, c’est le signalement de crimes ou de délits. Il peut aussi s’agir du signalement de la violation d’un engagement, d’un texte de loi, d’un texte international auquel la France est soumise, ou d’une menace grave pour l’intérêt général. La violation doit forcément être grave et manifeste, c’est-à-dire flagrante.

Le statut de lanceur d’alerte s’acquiert lorsque l’on réunit les conditions exposées ci-dessous.

Quels sont les 5 éléments qui définissent le lanceur d’alerte ?

Le lanceur d’alerte est un salarié de l’organisation concernée par l’alerte, ou un collaborateur extérieur ou occasionnel à celle-ci. Pour entrer dans les critères de définition du lanceur d’alerte, il faut réunir cinq caractéristiques.

Premièrement, on doit être une personne physique. On considère qu’une personne morale, comme une société par exemple, ne peut se constituer comme un lanceur d’alerte.

Deuxièmement, il faut avoir eu personnellement connaissance des faits que l’on signale. On ne peut signaler des faits que l’on n’a pas nous-mêmes constatés, qui seraient constatés par autrui.

Troisièmement, il faut agir de manière désintéressée. Cela signifie qu’on n’attend rien en contrepartie. Par exemple, le lanceur d’alerte n’effectue pas son signalement dans le but d’obtenir une gratification financière ou une évolution de carrière en retour.

Quatrièmement, il faut agir de bonne foi au moment du signalement : il s’agit seulement de constater des faits, sans chercher à nuire aux droits d’autrui.

Cinquièmement, les faits révélés par le signalement sont graves, et peuvent donc constituer des « alertes » au sens de la loi Sapin II.

Qu’est-ce qui ne peut pas faire l’objet d’une alerte selon la loi Sapin II ?

Plusieurs informations sont exclues de cette définition de l’alerte. Il s’agit des informations couvertes par le secret de la défense nationale, le secret médical, ou le secret des relations entre un avocat et son client.

Par exemple, si le lanceur d’alerte est un professionnel de santé tel qu’un pharmacien, et qu’il révèle des informations sur la situation d’un de ses patients, il encourt une sanction pénale, car ces informations sont en principe couvertes par le secret médical. Mais certaines informations suffisamment sensibles peuvent justifier la divulgation. C’est le cas notamment des faits relatifs à des risques graves pour la santé publique ou l’environnement.

À quoi sert un dispositif d’alerte générale ?

Le dispositif d’alerte générale permet de recueillir des signalements concernant l’existence ou la réalisation des risques d’atteintes graves.

Ce dispositif doit bien indiquer les étapes de la procédure de recueil de l’alerte. Son objectif est de faire cesser le comportement dénoncé, et de le sanctionner.

La loi Sapin II impose à plusieurs organismes la mise en place d’un dispositif d’alerte interne. C’est notamment le cas pour les communes de plus de 10 000 habitants, les départements et régions, et toute organisation publique ou privée d’au moins 50 agents ou 50 salariés. Les petites ou moyennes entreprises de moins de 50 salariés peuvent être concernées aussi si elles exercent dans les services financiers ou dans le domaine de la sécurité, comme le traitement de données à caractère personnel. Les risques liés à leur activité justifient la mise en place du dispositif.

Comment faire un signalement anticorruption ?

Il n’y a pas systématiquement de procédure anti-corruption au sein d’une entreprise. Mais s’il en existe une, il est recommandé de s’y référer et de suivre ses instructions.

La personne qui a eu connaissance d’un fait de corruption peut le signaler à son supérieur hiérarchique. Celui-ci peut être l’employeur, ou bien un référent désigné par l’employeur. Le référent peut être extérieur à l’entreprise. Son identité doit être renseignée dans la procédure de recueil des signalements. Il est impératif de lui fournir les faits, informations ou documents à l’appui de son signalement, quelle que soit leur forme.

En cas d’absence de réponse, un lanceur d’alerte peut adresser son signalement à l’autorité judiciaire. Il peut s’agir d’un juge ou d’un procureur.

Enfin, si au bout de trois mois, l’alerte n’a toujours pas été traitée, elle peut être rendue publique par le biais de médias, d’associations, ou encore de syndicats.

L’alerte peut aussi être adressée au Défenseur des droits, qui est une autorité constitutionnelle indépendante et qui doit orienter le lanceur d’alerte vers le bon organisme de recueil d’alertes.

Il existe aussi une procédure d’urgence. Elle prévoit qu’en cas de danger grave et imminent ou d’un risque de dommages irréversibles, le lanceur d’alerte peut s’adresser immédiatement à l’autorité judiciaire, administrative ou à l’ordre professionnel compétent.

À toutes les étapes de la procédure, la confidentialité de l’auteur du signalement doit être garantie. Il est conseillé tout d’abord d’adresser son signalement sous double enveloppe pour en renforcer la confidentialité. La transmission du courrier avec accusé de réception est aussi recommandée, car cela permet de connaitre le point de départ du signalement. Il est également prévu que les éléments du dossier qui identifient l’auteur et les personnes visées soient détruits si l’alerte ne donne lieu à aucune suite. La reproduction, copie ou diffusion des éléments du dossier est interdite.

Comment assurer la protection du lanceur d’alerte ?

La procédure de signalement doit être bien respectée pour obtenir le statut protecteur qui accompagne la notion de lanceur d’alerte. La mise en place d’une procédure permet de conférer au lanceur d’alerte un statut protecteur. En l’absence de procédure, la sécurité du lanceur d’alerte n’est pas pleinement assurée.

Lorsque la procédure de signalement est bien respectée, le lanceur d’alerte bénéficie d’une protection sous plusieurs aspects. Pour rappel, tout au long de la procédure, la stricte confidentialité de l’identité du lanceur d’alerte doit être garantie. Les personnes visées par son alerte et les informations contenues dans son signalement doivent aussi rester confidentielles.

En cas de divulgation d’éléments confidentiels propres au lanceur d’alerte, la sanction encourue est de 2 ans de prison et 30.000 euros d’amende.

En principe, ces informations ne peuvent pas être divulguées. Mais par exception, l’autorité judiciaire peut y avoir accès, sous conditions. Elle peut prendre connaissance des éléments qui identifient le lanceur d’alerte, si ce dernier donne son consentement à la divulgation. Après confirmation de l’existence d’un fait de corruption, l’autorité judiciaire peut aussi prendre connaissance des éléments qui identifient la personne mise en cause par l’alerte.

Par ailleurs, le lanceur d’alerte est irresponsable pénalement. Cela signifie qu’il est protégé contre les représailles comme le licenciement, la discrimination, les sanctions et les tentatives d’obstacle à son signalement.  

Enfin, le lanceur d’alerte a un droit d’accès à ses données personnelles lorsqu’elles font l’objet d’un traitement dans le cadre d’une alerte, conformément à l’article 15 du RGPD. Le lanceur d’alerte peut disposer d’un droit d’opposition, mais sous conditions. Pour l’exercer, il faut justifier de l’existence de raisons tenant à sa situation particulière.